Suicide d’un collègue : le suicide de trop

Nous avons appris avec autant de chagrin que de colère qu’un de nos collègues du Val-d’Oise s’est donné la mort vendredi 15 mars.
Parti prendre l’air, il n’est pas rentré chez lui. On l’a retrouvé pendu dans la forêt de Montmorency.


Jean Willot, 57 ans, enseignait à l’école Flammarion d’Eaubonne.

Une mère d’élève l’a accusé d’avoir brutalisé son fils et a porté plainte pour violences aggravées (il l’aurait tiré par le bras pour le contraindre à se lever et sortir de l’escalier au milieu duquel il restait assis). Son IEN l’a convoqué pour qu’il s’explique. Les représentants de parents d’élèves auraient téléphoné à son domicile pour qu’il s’explique. Il n’a pas supporté.

INSUPPORTABLE

Insupportable la pression des parents d’élèves.
Insupportable l’oreille complaisante de notre administration.
Insupportable la remise en cause de nos savoir-faire et savoir-être avec nos élèves.
Insupportable le piétinement de notre carrière par les médisances.
Insupportable l’absence de soutien de notre administration.
Insupportable la gestion managériale de l’école.
Insupportable la toute-puissance des parents d’élèves-clients du service public de l’éducation.
Insupportable de juxtaposer cette réalité au langage marketing « école de la confiance ».
Insupportable de passer sous silence tous les précédents suicides d’enseignants ou de les relier à des difficultés personnelles.

Jean Willot a été inhumé jeudi 21 mars.
Une marche blanche pourrait être organisée si sa famille l’autorise.
Nous citerons son nom et son histoire tragique chaque fois que nous accompagnerons des collègues parce qu’ils sont convoqués par l’administration pour des motifs similaires.
Nous invitons tous les collègues dans une situation semblable (remis en cause par l’administration sur la base de broutilles montées en épingle par des parents qui veulent « se payer le prof ») culpabilisés, persuadés qu’ils sont fautifs, honteux et silencieux, à se faire connaître et accompagner par le syndicat. Nous pouvons témoigner que les dossiers de ce style parvenus à notre connaissance sont nombreux, y compris, n’en doutez pas, pour des collègues dont les états de services ont toujours été jugés excellents par les inspections « ancienne moûture ». C’était le cas de Jean Willot.