De l’insulte en ploutocratie

L’INSULTE EN GUISE DE DIALOGUE SOCIAL


C’est vrai que c’est une nouvelle conception du dialogue social que d’insulter ceux qui marquent leur désaccord avec les orientations ou les contre-réformes présentées par un Président de la République et son gouvernement qui vient de déclarer qu’il ne cédera pas devant « les fainéants, les extrêmes et les cyniques ».
C’est mieux, bien sûr que d’envoyer la Troupe – ou les CRS – pour mater ceux qui osaient dire qu’ils n’étaient « pas d’accord », mais les étapes peuvent vite se franchir.

Jamais nous n’avions entendu autant de mépris porté à l’égard de ceux qui osent dire « non ». Même les patrons disaient encore il n’y a pas si longtemps « que les salariés étaient la première richesse de l’entreprise » dans le même temps d’ailleurs, où ils les viraient le lendemain.

Mais répondons à ceux qui nous insultent, que nous, salariés et citoyens responsables du sixième pays le plus riche du monde, nous nous mobiliserons contre des ordonnances qui prolongent la loi El Khomri, qui représentent une véritable régression sociale, qui sont des attaques contre la démocratie et les principes de la République.

Rappelons entre autres choses que les amis du Président ex-banquier de Rothschild, dont les patrimoines sont supérieurs à 2,5 millions d’euros, ne débourseront plus que 520 millions d’euros après la réforme… contre 2,8 milliards aujourd’hui. Une ristourne coquette de 2,3 milliards qui profitera, comme la « flat tax » instituant un prélèvement forfaitaire unique de 30%, aux plus riches des plus riches.
Les pauvres doivent en effet donner plus et recevoir moins pour compenser la baisse de l’augmentation des revenus des riches…

Signalons que les banques et assurances, non soumises à la TVA mais à une taxe sur les salaires, ne paieront désormais plus celle-ci sur leurs hauts salariés. Coût fiscal pour le pays : 300 millions €.
Beau cadeau pour la corporation dont est issu Macron. Parallèlement, l’Etat récupère 160 millions sur « notre » journée de carence, 390 millions sur les APL.
Dans une ploutocratie, c’est « cynique » mais cohérent…

Notons aussi qu’au bout de quinze ans de carrière, un professeur des écoles français reste mal payé par rapport à d’autres « grands pays » européens et gagne moins qu’un Italien, un Britannique, ou nettement moins qu’un Allemand. Mais ce n’est pas « extrême » et ne nous plaignons pas, il n’est pas le plus mal loti d’Europe : Slovaques, Polonais, Hongrois ou Tchèques gagnant moins (dans des pays bien moins riches…).
Le pouvoir d’achat des profs français a baissé de près de 10% entre 2000 et 2010 (source OCDE) ; dans le même temps, seuls les enseignants japonais, et à un moindre degré les Suisses, ont connu pareil sort (mais leur salaire reste très supérieur à celui des français). Et la baisse continue !
En moyenne dans l’OCDE, les profs des autres pays ont été augmentés de près de 20% sur cette période.
Les profs français restent donc parmi les moins bien payés des pays de l’OCDE, au niveau de pays comme la Grèce ou la Slovénie (où le niveau de vie général est bien moins élevé).

Gel du point d’indice ne signifie pas gel des salaires, mais baisse des salaires.
Depuis 2010 et le gel du point d’indice pour les fonctionnaires, le salaire baisse régulièrement car les prélèvements, eux, augmentent. Certains fonctionnaires bénéficient d’un treizième mois ou de primes, mais les instits n’ont rien, ou plutôt n’avaient rien : ils touchent désormais – et pour combien de temps ?
– une prime de 1200 € bruts. Cependant cette prime est loin de couvrir la baisse de salaire enregistrée entre 2010 et 2014…

Il ne reste plus qu’à croiser les courbes descendantes des salaires avec celles montantes du coût de la vie, à remarquer que nos responsabilités et nos « missions » augmentent sans cesse et on comprendra pourquoi, loin d’être « fainéants », les enseignants ont de bonnes raisons de penser que c’est la République qui est cassée !

Les enseignants sont quotidiennement au front de la défense des valeurs de la République. Sont-ils prêts à construire un rapport de force désormais nécessaire pour éviter un retour à un régime social et politique digne du Second Empire ?