Nous sommes tous concernés !
.
La « réforme » des retraites, qui s’annonce être la plus importante du quinquennat, vise à mettre fin aux 42 régimes de retraite actuels pour les remplacer par un système unique de « retraite par points ».
Aujourd’hui, 95% de notre système de retraite fonctionne par répartition, cela signifie que les cotisations du moment financent les retraites du moment, et que ces cotisations sont constitutives des futurs droits à la retraite. Ce système collectif a pour principe la solidarité entre les générations, sa qualité principale étant sa sécurité, le financement reposant sur la masse salariale globale.
UN SYSTEME UNIVERSEL DE « RETRAITE PAR POINTS » : C’EST QUOI ?
La suite dans le document intersyndical joint…
NOTRE ANALYSE :
Si vous entendez parler d’une dette de 2 139 milliards d’euros, soit peu ou prou le PIB annuel de la France, sachez que ce chiffre ne correspond ni à une dette ni à ce que paie l’État pour la retraite des fonctionnaires mais représente les « engagements » de l’État, c’est-à-dire ce que représentent au total les retraites actuelles plus celles qui seront versées aux fonctionnaires actifs qui partiront à la retraite entre l’année prochaine et dans 40 ans… Pour le comparer au PIB, le montant de ce dernier doit donc être multiplié par 40 !
L’hallali contre les « régimes spéciaux » ?
L’équilibre d’un régime, d’une caisse, d’un budget, est avant tout la différence entre les recettes et les dépenses. Les recettes dépendent :
• Du nombre de cotisants
• Du montant des cotisations perçues.
La plupart des régimes spéciaux ont des niveaux de cotisation plus élevés que le régime général.
Ce que le gouvernement ne dit pas, c’est qu’au régime général s’ajoute les régimes complémentaires obligatoires, AGIRC-ARRCO (dont les régimes spéciaux ne bénéficient pas) et qui rassemblent 77,184 milliards d’euros de ressources.
La cotisation moyenne par individu au régime général est ainsi portée à 8484 euros, une valeur beaucoup plus comparable aux 11265 euros de la fonction publique ou au 13325 euros de la SNCF.
Pour les différences entre « régime général » et « régimes spéciaux », plusieurs facteurs les expliquent :
• Des taux de cotisations sur salaires plus élevés (les salariés et les employeurs consacrent plus d’argent pour financer leur régime)
• Des salaires plus élevés dans la branche.
Quoiqu’il en soit, ce constat illustre une meilleure répartition des richesses dans les régimes spéciaux, consacrée à une protection sociale collective.
Vouloir aligner tous les régimes sur le niveau de prestation du régime général, c’est baisser les pensions de nombreux retraités.
En prenant en compte la « pension moyenne » de chaque régime, les disparités sont importantes : Avec une pension moyenne de 8190 euros annuels, soit 682,5 euros mensuels, le régime général est inférieur au seuil de pauvreté (il en représente 60%), établit à 1015 euros en 2017.
N’oublions pas que toutes ces données ne sont que des moyennes. 7,6% des retraités vivent sous le seuil de pauvreté (INSEE).
Il n’en reste pas moins qu’organiser la convergence vers le régime général, c’est augmenter à dessein le risque de pauvreté.
A l’instar de la baisse des prestations de sécurité sociale qui ont favorisé l’essor du secteur assurantiel, aligner tous les régimes sur le régime général revient à favoriser les retraites supplémentaires privées, donc à privatiser progressivement les retraites.
La retraite avec un système par points.
Elle aura, nous pouvons le supposer, pour ambition de créer un régime « à l’équilibre ». Si certains pensent qu’en versant tout le monde dans le régime général on réglera le problème du déficit des retraites, ils se mettent le doigt dans l’œil. En appliquant les conditions de fonctionnement du régime général à la population entière, le « déficit » passerait, selon leur calcul, de 87 milliards d’euros (dont 32 milliards de fonction publique alors que ce n’est pas un déficit mais une somme inscrite au budget de l’État, voir encadré) à 79 milliards.
La création d’un régime par points à l’équilibre comme en Suède exige comme là-bas l’augmentation des cotisations patronales, ce qui est peu probable avec le gouvernement actuel. L’équilibre selon Macron entraînera donc nécessairement une dégradation des conditions de départ à la retraite (âge et pensions) pour absorber ce déficit.
Alors pourquoi ?
Pour privatiser les retraites, oui. Mais pas seulement.
Les retraites comme privatisation de notre vieillesse et philosophie « de classe ».
C’est fou comme les gouvernements successifs aiment raconter des bêtises sur nos régimes de retraite. Il est vrai qu’il existe de nombreux cas différents, fruits de notre histoire sociale, directement liée au rapport de force et à la possibilité qu’ont eue, à certains moments, les salariés pour faire progresser leurs droits.
A ceux qui sont prompts à nous accuser d’opposition systématique, nous répondons que nous avons au contraire de nombreuses revendications concernant les retraites, comme le retour à l’âge de départ à 60 ans. Et au-delà, s’il faut simplifier, nous pouvons très bien imaginer une harmonisation sur le régime le plus favorable : L’égalité à la hausse.
Mais le débat sur les retraites cache un débat sur tout autre chose.
Comme à chaque fois qu’il est question de gros sous, le fond porte sur la répartition des richesses. L’argent existe, seulement le gouvernement préfère le donner aux entreprises et aux plus riches :
• 41 milliards de Pacte de Responsabilité (et Solidarité…)
• 43 milliards de Crédit Impôt Compétitivité Emploi
• 3,2 milliards avec la suppression de l’Impôt Sur la Fortune
• 6 milliards avec la suppression de l’Exit Tax (qui s’applique aux contribuables
s’exilent fiscalement)
Rajoutons que la nouvelle taxation des mirifiques revenus boursiers fera économiser des impôts aux contribuables/actionnaires et boursicoteurs…
L’argument évoqué pour donner cet argent aux plus riches était la relance de notre économie, la création d’emplois.
C’est un échec.
Pour relancer l’économie, il faut faire en sorte de relancer la consommation du plus grand nombre…
La réalité, c’est que nous sommes bien dans une « lutte des classes » et que la classe dominante use de tout son pouvoir pour accroitre ses richesses, ici en ouvrant la porte à une marchandisation de nos retraites, au détriment de la classe des salariés.
Et pour ceux qui douteraient encore de cette « lutte » dans un pays qui semble retourner vers l’Ancien Régime, rappelons que non satisfaite de ses cadeaux fiscaux, la classe dominante aime la fraude fiscale :
• 20 milliards de fraude à la TVA
• 60 à 80 milliards d’évasion fiscale (et il s’agit d’une estimation que les révélations comme les Panama Papers font réévaluer à la hausse…).
Bref, autant de ressources en moins pour financer les retraites ou toute autre protection sociale.
Qui peut être d’accord avec cela ?
*****
Vous trouverez ici un DOSSIER REFORME DES RETRAITES pour bien visualiser les enjeux :